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60 millions de social-traîtres II

« Chaque homme sait, au fond de lui, qu'il n'est qu'un tas de merde sans intérêt. » (Valerie Solanas)

Paris est une fête

Quand j'étais plus petite, et plus grosse, je rêvais d'habiter à Paris, pour noyer ma gaucherie et ma timidité dans l'anonymat des rues charriant leurs caillots de bagnoles bruyantes, de bus déboîtant prioritairement et de beaux parigots sombres portant écharpe au crépuscule dans des quartiers dont je rêvais d'apprendre le nom.

Aujourd'hui, j'ai de la fenêtre de mon appartement une vue en
trident sur un bon gros bout du onzième arrondissement. Bruyant
et sombre. Il est prodigieux pourtant l'effort qu'il me faut entreprendre pour raviver le souvenir de mon ancien rêve et y contempler le reflet de celle que j'étais. Aujourd'hui, je suis plus grande, et plus mince, et noyée pour de bon est ma timidité ; je rêve de quitter cette soûlante effervescence mais les règles du jeu ont complètement changé.

Partout où je pose mes pas, entre Charonne et Goncourt, un cadavre me hante. Quand ce n'est pas un cadavre humain, c'est une période révolue, un bout de nostalgie et je déteste la nostalgie, je déteste le passé, mais le présent aujourd'hui est une feuille de papier tue-mouches. Je reste dans mon cimetière en espérant la venue d'une âme qui vive.

Wendy James le 22/09/05 à 17 h 26 dans Social-traître
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