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60 millions de social-traîtres II

« Chaque homme sait, au fond de lui, qu'il n'est qu'un tas de merde sans intérêt. » (Valerie Solanas)

Oh hisse, enculé

À la maison, c’est la guerre des fans : Un gros barbu fanatique de Johnny s’est maqué avec une vieille pie zozoteuse fanatique, elle, de Frédéric François. La France au fond des yeux. Sans doute des Ch'tis, encore : ils fournissent le gros des sujets de ces émissions de TF1. Il ne faut pas dire du mal des Ch'tis, comme l’ont ordonné les gens du pouvoir, Dany Boon et Nicolas Sarkozy : et mon cul, c’est du poulet ? La banderole des bourrins du PSG, pour une fois, rivalisait d’audace et d'humour avec les meilleures accroches de feu Hara-Kiri. Du pur Choron.

« Va écouter ton Frédéric François ! » L’insulte fuse, implacable. Le gros neuneu, sosie flou de Robert Hue, ne s’en laisse pas compter par sa bique romantique à la grammaire tremblante : « Aller voir le film à qui, à Johnny Hallyday ? » s’offusque-t-elle avec un relent d’accent nordiste, teinté de la vague pédophilie qui caractérise ces gros cons. Elle rêve qu’on lui fasse « l’amour à l’italienne ». La fascination est forte qu’exercent sur moi ces bas-fonds.

La misère humaine en pleine face. Ces vies délabrées, à peine les vagins furent-ils franchis. Ce salon où trône Smet, le misérable archéobeauf franco-belge, telle une idole asiatique quelconque, ici taillée grandeur nature, dans du carton brillant — autant que son œil est terne. PLV : publicité sur le lieu de (non-)vie.

« Frédéric va me dédicacer mon tableau de bord. J’ai acheté un crayon (sic) spécial, et il va me le dédicacer. » L’envie de vomir  (gerber) devant tant de misère intellectuelle me saisit, à moins que ce ne soient les boulettes de poulet à la sauce piquante. J’ai remarqué que la qualité baissait chez les traiteurs chinois du coin, depuis les événements.

Je me suis retrouvé en terrasse du Flore il y a peu, avec trois camarades de mufflée. La mufflée de l’année, sans doute aucun : pour venir s’échouer au Flore, il faut être très alcoolisé. Le petit-déjeuner au beurre d’Échiré me rappelle mes nuits au Raphaël. Et P. attire mon attention : « Philippe Val est derrière nous. » Je me retourne : l’éditorialiste mou, en costume, petit-déjeune avec deux truffes, en costumes elles aussi. Ça travaille. Je gueule « social-traître », quelque chose à propos de Patrick Font également. Val se retourne, mais ne répond pas, je dois avoir l’air totalement bourré. Nous avons enchaîné dix bars pendant la nuit, avant d'atterrir au Flore où le sinistre éditorialiste, membre honoraire de la coterie des glands superlibéraux, nous attend avec sa mine chafouine ; attend qu’on lui explique un peu de quel alcool de bois on se chauffe. Alors j’insulte plus ou moins. Le mot social-traître m’a toujours semblé avoir été inventé pour ce mec-là. Ensuite, avec P., nous tentons de lancer une insurrection (une grève, au moins) « pour un alcool réel ». Boulevard Saint-Germain, un peu d’agit-prop, pour combattre l’agent infectieux qui transforme ces gens qui nous croisent (parfois en souriant, toujours en nous évitant) en robots inconscients, aconscients, fiers d’aller travailler. Quelques jours plus tard, Tristan-Edern Vaquette, qui ressemble étrangement à Michaël Youn, s’engueule sur le plateau du respectable Taddei avec la kapo de Val, Caroline Fourest. L’imbuvable Caroline Fourest qui s’étrangle qu’on pût (je voulais caser pute mais la grammaire a des limites) trouver drôle la banderole des bourrins du PSG. Vaquette est le seul type sensé du plateau. Je respecte beaucoup Taddei d’inviter ces gens-là, Soral compris, qui quand il ne divague pas sur les vertus du « lepénisme marxiste » (ah, ah !) peut être très drôle quand il se contente de faire la provoc pour laquelle il existe : « Les éditeurs aujourd’hui ne découvrent plus de vrais talents, bien trop occupés qu'ils sont à se faire sucer par des putes albanaises dans des jacuzzis. » On sent bien que Taddei crèverait d’ennui s’il était obligé de n’inviter que des Nina Companeez ou autres tiédasses. Vaquette a été parfait, mais mal habillé. Crête sur la tête, tout ça. Look d'abruti par lequel il invite les cons à le mépriser. Normal, c’est un vrai bouffon. Qui n’a pas bafouillé. Qui a dit les choses les plus intelligentes du plateau sur la liberté d’expression, coincé entre Bruno Gaccio (« Quand une vanne blesse quelqu’un, ce n’est plus drôle ») et Fourest (« Je travaille chez Charlie Hebdo, mon combat est donc la liberté d’expression »). Gosh ! J’aurais explosé. J’aurais sauté sur ces deux cons. Ces deux exemples types de la social-trahison. Fourest, Gaccio, Val. Ou alors je me serais barré avant d’éclater en sanglots, de peur.

La banderole potache devenue crime contre l’humanité… Dans un genre similaire, je trouvais assez drôle la très méprisante « Pendant que les Gones inventaient le cinéma, vos pères crevaient dans les mines » que les blaireaux de supporters lyonnais avaient balancée aux blaireaux de supporters stéphanois. Ces gens-là, les supporters, ont des génies du slogan en leur sein. Les gens de goût apprécient, les mecs. Bien sûr, vous êtes un sacré ramassis de bourrins, et je n’irai pas boire une bière en votre sinistre compagnie, mais vos banderoles me font rire. « On n’est pas racistes, la preuve : on t’encule ! »

À la réflexion, c’est peut-être ce qui a fini par tuer Gilardi… Aujourd’hui, on s’indigne et on condamne. Qu’est-ce qu’on s’emmerde

Nikita Calvus-Mons le 05/04/08 à 07 h 10 dans Sportif-traître
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Commentaires

C'est vrai qu'elle était marrante cette banderole (et tellement vrai en plus - s'il y a procès, c'est pour toi, hein ?).
Et puis bon, c'est durant un match de foot. S'indigner de voir la connerie se deployer dans l'enceinte d'un stade de foot, c'est comme s'indigner de voir des bites dans un film X. C'est comme ta dernière formule : on s'emmerde tellement qu'on s'invente des indignations et qu'on colle des procès, parce que tu comprends, quand on habite à Lens, c'est comme être curé, c'est une vocation, un truc dont on a pas le droit de se moquer.

memapa - 05.04.08 à 13:05 - # - Répondre -

Re:

Les développements de cette affaire sont vraiment révélateurs de ce climat de flip général sur le racisme...

Et, oui, dans un stade, la connerie est partout. Cette banderole, je crois, est restée quatre minutes en tout et pour tout. C'est simplement parce que Sarkozy s'est indigné publiquement que tout le monde a fait de la surenchère sur une pauvre blague (plutôt drôle, oui, merde). Le mot "crime" a été prononcé ! Les flics cherchent des traces d'ADN sur des bouts de banderole (comme pour traquer des pédophiles, tiens) ! Les magasins de sport du Pas-de-Calais ont retiré de la vente les maillots du PSG, en attendant que des "sanctions contre les protagonistes soient tombées". C'est vraiment l'hallu totale. Les vendeurs de fringues qui s'essayent à la politique...

60millions - 05.04.08 à 19:15 - # - Répondre -

Heureusement

Purée, heureusement que vous êtes là les mecs, je m'étais laissé avoir, sur le coup de la banderole.

Sinon, je partage d'un certain côté ta diatribe sur Val et Fourrest, mais je trouve qu'aller jusqu'à les traiter de suppôts du libéralisme est contre-productif : ils ne le sont clairement pas et ça décrédibilise ton propos.

Ce qui fait de Val ce qu'il est aujourd'hui, c'est le narcissisme, un ego délirant qui le fait se croire so much smarter que n'importe qui, et surtout que les gens qui furent ses amis.

Je me souviens d'un de ses éditos, où il parlait d'être allé voir L'avocat de la terreur, sur Vergès (que je n'ai d'ailleurs pas vu). Il explique que sa première pensée en sortant de la salle fut "que risquent d'en penser les lecteurs de Charlie", avouant par là qu'il se vit comme une sorte de père spirituel d'une armée d'enfant intellectuels à qui il vend sa feuille de chou et qui sont infoutus de penser par eux-mêmes. Et que s'ils pensent pas eux-mêmes, ils sont tellement cons que Val doit s'y coller et leur donner les armes pour comprendre ce monde dont la complexité leur échappe, pris qu'ils sont, tels des animaux, dans les passions malsaines qui les animent.

Je crois que c'est cet édito qui fut la goutte d'eau pour moi, après des années d'énervements quasi-hebdomadaires face à sa manière de toujours éditorialiser contre ses lecteurs, à toujours trouver l'angle précis qui lui permettra de montrer (à qui, c'est ça la question) comme il est un être raisonnable au-dessus des passions sales qui animent l'extrème-gauche (qui pour lui au fond est tout ce qui s'éloigne de plus de seize centimètres de la ligne du centre).

Mais, malgré tout, dans son "oeuvre", il y a une certaine vision du plaisir et de l'individu libre comme principes que la société a pour vocation de protéger des passions létales des autres, en créant de la loi. Qu'il ne soit pas capable, pour diverses raisons, d'articuler cette vision de manière toujours cohérente est fort dommage, et il est par ailleurs un individu manifestement assez imbuvable à qui beaucoup de réalités échappent. Mais il ne faut sans doute pas aller trop loin et verser dans une haine un peu aveugle, ni surtout dans une caractérisation politique fausse de sa pathologie, car apès ces mots ne veulent plus rien dire.

SInon j'aime bien Fourrest, dans son rôle. Le manque d'humour chez ces gens-là et assez terrible, mais ça n'en fait pas des nazis pour autant. Son bouquin sur Ramadon est plutôt intéressant. Il y a quand même un élan, chez elle, de résistance au retour de l'obscurantisme que je trouve assez courageux (enfin, toutes proportions gardées). Leurs amalgammes ensuite sur les altermondialistes sont excessifs. Mais on ne peut pas ranger quiconque avec qui on a des problèmes à se mettre d'accord sur tout dans le camp des ennemis.

Bref, mon côté moraliste et relativiste a ses faiblesses, je le concède volontiers, mais pas moins que l'attitude tout ou rien.

vfwh - 06.04.08 à 02:04 - # - Répondre -

Re: Heureusement

Ben en fait non. Outre effectivement les defauts que tu énumères (en particulier un ego totalement hors de proportion avec les capacités réelles), je suis d'accord avec Nikita. Non seulement Val est un libéral (au sens économique), mais en plus il partage les différentes pathologies mentales de ses congénères (en particulier une haine peu dissimulée du populo - qu'il stigmatisme sous le nom de populisme).
La différence avec, disons un Devedjian, vient de ce que Val, tient à son étiquette de gauche, et préfèrerait que ça se passe de manière plus jolie à regarder. D'ailleurs il est le premier a le dire : il n'est pas contre - sur le fond - le systéme économique, mais contre ses conséquences (comme si on pouvait avoir les avantages - éventuels - de qchose sans ses inconvénients - ça donne une idée de la profondeur conceptuelle de Val)
Comme ça fait 5 ans (au moins) que je n'ai plus lu Charlie, il va m'etre difficile de faire la preuve par l'exemple, mais comme j'avais déjà constaté ça à l'époque, je doute que ça se soit arrangé.
Par ailleurs, personne ne l'a traité de nazi (malgré un menton que lui aurait envié le duce) ; c'est de la basse thétorique :)

Et pour finir, il est bien difficile dans ces conditions de ne pas le traiter de social-traitre.

Anonyme - 06.04.08 à 11:03 - # - Répondre -

Re: Heureusement

Absolument d'accord avec ton propos sur Val et le peuple, c'est très juste.

Concernant sa position économique, il faudrait clarifier ce que tu entends par "le système économique". Si tu entends pas là un fonctionnement économique acceptant l'inaliénabilité de la propriété privée et fondé sur les échanges, oui, mais être contre signifie être purement et simplement communiste, sous une forme ou une autre. Et je ne dis pas ça comme une insulte, by the way. Val n'est pas communiste.

Si tu parles d'un système fondé uniquement sur la propriété privée, n'acceptant pas le bien collectif et ayant comme objectif ultime la liberté entière de ceux qui ont le pouvoir et l'argent d'en disposer à leur entière discrétion, alors non, je ne crois pas que Val soit pour.

On peut concevoir et souhaiter l'avènement de modes de fonctionnement économiques acceptant la propriété privée, qu'elle soit de patrimoine ou de moyens de production, mais encadrant leur usage dans un contexte politique ayant d'autres objectifs, notamment de permettre l'expression de la liberté et la possibilité d'une vie riche pour tout un chacun sans corrélation avec son niveau de patrimoine, notamment grâce à des mécanismes de solidarité, de mise en commun de ressources et de moyens ou autres choses de ce genre.

Ce n'est pas être superlibéral de souhaiter cela et, à la lecture de Val, il me semble que c'est grosso modo le modèle qu'il semble souhaiter au fil de ses éditos. Ca ne me choque pas, moi aussi, surtout par rapport à là où nous sommes aujourd'hui, franchement j'aimerais bien un monde comme ça.

Le problème de Val c'est la cohérence et le manque de profondeur de son humanisme. D'un côté par exemple il va stigmatiser le communisme et le gauchisme en vertu du côté irréaliste de mettre tout le monde d'accord et surtout en raison de tous les comportements interdits qui découlent naturellement d'un tel système, mais d'un autre côté il va prôner des interdictions d'organisations ou de discours par la loi en invoquant des principes ad hoc en contradiction avec ce qu'il disait la semaine précédente. Ce qui ressort au fond des positions de Val, c'est une forme de communisme personnel, où la société devrait être formattée pour être en complète phase avec ses propres désirs, et dont il devrait être le chef, car il peut aussi changer d'avis et ce serait alors plus simple pour changer la constitution.

vfwh - 07.04.08 à 01:02 - # - Répondre -

Re: Heureusement

Je ne pense pas que Val ait réfléchit aussi loin. Quand je dis qu'il est libéral (économique), ça veut dire qu'il a fait sienne la doxa économique (et politique) ambiante (à quelques bémols hypermoraux près). Il trouve que le système tel qu'il est est ok, c'est tout ce que je dis. Opportuniste et peu doué pour la réflexion, il ne s'est pas vraiment demandé comment  fonctionnait l'ensemble de l'économie, ce qu'elle impliquait, et ce à quoi elle risquait d'amener. Quand on veut l'amitié entre les peuples (même si on n'aime pas le peuple), pas besoin de se poser la question de savoir comment et qui bossent dans les soutes. C'est - comme tu le rappelles - quand je l'ai lu fustiger les petits cons de gauchistes irresponsables (je résume), que je me suis rendu compte qu'il ne présentait que des différences cosmétiques avec par exemple un Claude Imbert : surfant sur la doxa du moment, pret à répéter ce que le mitan répète, adoptant les mêmes tics, les mêmes intolérances et les mêmes dégouts que le reste du clan (encore que Imbert soit un vrai réac dans l'âme, ce qui ne l'excuse en rien sauf au niveau de l'opportunisme).
Val n'est rien, sinon un de ces clones interchangeables qui hantent le paysage médiatique et qui sont - très sincerement - contre les discriminations, le racisme et en général le mal parce que c'est pas bien. Position que j'ai qualifié d'hypermorale, autrement dit une sorte de respect des convenances agrémenté de positions de principes qui ne mangent pas de pain (ça ne veut evidemment pas dire que je sois POUR le racisme, etc). C'est tout bêtement le retour de l'Idéalisme fin XIXème quand nos amis les humanistes pensaient grands principes (jamais mis en application) alors qu'un ouvrier avait une durée de vie de moins de 50 ans. Ok, je fais un peu dans le pathos, mais il faut parfois mettre un peu les points sur les I.

memapa - 07.04.08 à 01:21 - # - Répondre -

Re: Heureusement

Il est agréable de creuser un peu un sujet comme nous le faisons et je resterai volontiers le reste de la nuit pour commencer à digresser réellement et élargir le débat à partir des problématiques que le cas Val suscite (car je crois que nous avons épuisé son cas ad hominem).

Il faut malheureusement que j'aille me coucher si je veux pouvoir aller extorquer mon kilo de chair fraîche demain.

Il faudrait que Nikita poste plutôt le samedi après-midi...

vfwh - 07.04.08 à 01:49 - # - Répondre -

Re: Heureusement

Oui, le "superlibéraux" ne veut rien dire ; à vrai dire ce texte a été écrit deux trois jours avant d'être posté et il n'était pas du tout fini ; je l'ai fini en un quart d'heure, avant de me coucher, après une énième dérive nocturne dans les troquets parisiens, et j'ai laissé toutes les bêtises sans me relire ou presque (en me relisant, mais en ne trouvant pas le courage de réécrire, plutôt).

N'empêche : tu le dis toi-même, Val est en effet un centriste moraliste de la pire espèce. "Superlibéraux" était donc une tentative d'insulte vexante pour ce type qui s'est cru un jour anti-conformiste, et dont le journal par ses pires côtés (dont Fourest) est à fond dans la doxa de la gauche morale type PS que je ne supporte plus. Or la doxa et le conformisme ces temps-ci c'est un peu beaucoup le libéralisme, l'aveuglement face aux échecs du capitalisme, etc. Pas si malvenu donc le "superlibéraux" avec sa connotation potache "super héros" (ou "supervilain"). C'est après tout un peu comme traiter de nazis les gars de Ras l'Front ou du Scalp : c'est bête, mais ça soulage. Et c'est pas si bête dans la mesure où les insultés finissent par se gratter la tête en s'interrogeant, outrés : "comment ? moi ? entre tous ? nazi ?"

Et pourquoi pas ?

60millions - 06.04.08 à 18:00 - # - Répondre -

Re: Heureusement

Le défoulage, ça fait du bien et je serais mal placé pour stigmatiser ça en général.

Mais il est bon quand on se défoule d'avoir un couillon qui passe par là pour dire "ok, allez stop, arrête tes conneries" et te balancer un verre d'eau froide sur la tronche...

Val est un centriste moraliste, oui, mais je préfèrerais sans doute déjeûner avec Val qu'avec, je ne sais pas, Kouchner ou Manuel Vals.

Il est sans doute possible, avec beaucoup de patience, de lui opposer certains principes, de lui arracher quelques éclairs de lucidité, bref, de comprendre certaines choses ensemble.

Quant à l'anathème dont tu penses qu'il peut voir pour effet de susciter un questionnement, j'ai plutôt le sentiment (et me semble-t-il l'expérience) qu'il a l'effet exactement inverse, de radicaliser les incompréhensions et les postures.

Val on s'en fout, d'un certain côté, mais il représente un renoncement très contemporain, auquel il faut peut-être opposer une tentative de le comprendre et de discuter avec, plutôt que de le radicaliser.

vfwh - 07.04.08 à 00:12 - # - Répondre -

Re: Heureusement

C'est une bonne remarque, et je me suis souvent posé la question (qui se pose entre autre au boulot) : faut-il se prendre le connard frontalement ou essayer la maieutique ? Je dois dire que je suis arrivé à la conclusion inverse de la tienne : si le frontal donne des résultats mitigés (et radicalise le connard), la technique « discutons et tout va s'arranger » est encore moins efficace, d'abord parce que c'est un connard et qu'au final c'est toi qui fait des concessions et pas lui, parce que justement c'est toi qui n'est pas le connard, qui est de bon foi, et qui veut que les choses avancent. L'effet pervers est encore plus grand.

Accessoirement, si demain Val disparait (d'une longue et cruelle maladie) et Charlie par la même occasion, la démocratie (et ses spécificités connexes) perdrait-elle grand chose ? Très honnêtement je ne le pense pas. Val n'a aucune valeur ajoutée si, je puis dire. Aucune raison de le ménager donc. En plus, s'en prendre à lui, c'est bien plus drôle, parce qu'il monte au 1/4 de tour sur ses grands chevaux sans même s'apercevoir qu'ils ont été sciés aux genoux.

Sinon, oui, Val, on s'en fout (enfin, moi et toi), et sur le fond, lui aussi (à moins qu'on commence à trier à plus de 10000 exemplaires).

memapa - 07.04.08 à 00:46 - # - Répondre -

Re: Heureusement

Je trouverais dommage de perdre la chronique de Charb et l'univers de beaucoup de leurs dessinateurs. Il y a des espaces de liberté dans Charlie qu'il n'y a pas ailleurs, même si je concède volontiers que Val n'y est pas pour grand-chose. Il n'y a qu'à voir l'exclusion de Lefred-Thouron il y a de ça un certain nombre d'années maintenant pour s'en convaincre.

Lefred-Thouron avait fait un dessin lors de la condamnation (ou l'inculpation, je ne sais plus) de Font, montrant Font s'amusant avec une petite, qui s'exclamait "Ciel, mes parents !" en les voyant arriver. C'était un dessin banal, rigolo sans être génial, en tous cas bien moins saignant que beaucoup de dessins que Charlie publie chaque semaine sans états-d'âme sur des tas de gens. Long story short, Lefred-Thouron s'était fait sommer de retirer son dessin ou de se faire virer de Charlie, en vertu d'une gymnastique jésuistique autour du fait que tous les dessinateurs avaient la liberté de publier ce qu'ils voulaient. Lefred-Thouron avait préféré insister et se faire virer.

Val a donc publié le dessin en tout petit, accompagné d'un raisonnement fumeux sur la loyauté en amitié bla bla. Moi qui ait fréquenté les mouvement sectaires d'extrême gauche, j'y ai reconnu cette gymnastique habituelle des loyautés qui ne se résolvent que sur la question de qui est le chef et qui est le traître. C'était à gerber et il me semble que ce fut un tournant pour Charlie, où Val a commencé à asseoir son pouvoir sectaire sur cette rédaction. Depuis, l'équipe de rédaction a bien changé.

Quant à ouvrir le dialogue avec les connards, comme tu dis, c'est une question de mesure. Ouvrir le dialogue ne veut pas dire être le seul à faire des compromis et, surtout, veut dire que justement on ne se résume pas à simplement "être un connard". Comme je dis plus haut, c'est "jusqu'à preuve du contraire" et part du principe qu'il y a quelqu'un avec qui discuter, et qu'on ne pourra avancer que si on fait l'effort de comprendre ce qu'il veut dire sans a priori.

S'il s'avère que tu n'as en effet qu'un connard pur et simple en face toi, alors ça dépend de quels sont tes objectifs.

Si tu as des objectifs que tu ne pourras pas atteindre sans faire des compromis avec les connards, et que tu ne les fait pas, n'atteignant pas de ce fait ton objectif, alors ça devient juste une question narcissique et d'amour propre. Mais on commence à s'éloigner un peu du sujet.

vfwh - 07.04.08 à 01:36 - # - Répondre -

Re: Heureusement

Super libéral, le Val il l'a été losqu'il s'est agit de pourfendre les "nonistes" du référendum sur le traité européen, notamment. On a d'ailleurs à cette occasion pu prendre toute la mesure de sa mauvaise foi, par exemple dans l'utilisation excessive jusqu'à la nausée de la pensée des philosophes des Lumières, dont il est particulièrement friand... Il en a ragé, du non... Ramassis de gauchistes inconséquents ! Et que pense-t'il du mini-traité ?

TH. - 06.04.08 à 19:52 - # - Répondre -

Re: Heureusement

J'ai partagé le même énervement lors du débat sur le référendum, où Val était véritablement odieux et intellectuellement inepte, mais on ne peut pas caractériser sa position de superlibérale, non. Son propos était qu'il valait mieux tenir que courir et que le traité consitutionnel était une  avancée civilisationnelle de par la mise en commun de valeurs, l'institution de mécanismes démocratiques au sein d'un vaste territoire culturellement et historiquement divers, marqué par les guerres à travers le temps.

Cette position était une vraie position qui me semblait justifiable, ou en tous cas assez noble. Le problème de cette position est qu'elle était utopiste et ne tenait aucun compte ni de la légitimité des organisateurs, ni du contexte politique dans lequel elle s'inscrivait, ni plus prosaïquement du contenu réel du texte (les annexes qui invalidaient la charte des droits fondamentaux, etc.). Mais Val n'était pas de ceux qui défendaient le texte en vertu de son contenu économiquement libéral. Il n'est donc pas exact de caractériser ça ainsi, et, puisque ce n'est pas exact, c'est donc inepte et contribue à la cacophonie et au règne de la mauvaise foi.

En tous cas, ce qui m'intéresse moi, c'est de pouvoir s'expliquer entre gens honnêtes et animés de bonnes intentions. J'essaie donc de me refuser à caricaturer au point d'en faire autre chose que ce qu'elle est, la position des adversaires. Je ne supporte pas qu'on réponde à mes arguments en faisant comme si j'avais dit autre chose que ce que j'ai dit, et il me semble que la seule manière de comprendre quelque chose à quoi que ce soit est d'accepter que son interlocuteur avec qui on n'est pas d'accord a peut être compris quelque chose que je n'ai pas vu, jusqu'à preuve du contraire. La priorité dans une discussion est de comprendre ce que l'autre essaie de dire.

Peu de gens sont capables de ça, mais je ne vois pas pourquoi cela nous dispenserait de l'être.

J'ai l'impression que je vais passer pour un curé avec des commentaires comme ça, mais bon, je vois ça comme ça...

vfwh - 07.04.08 à 00:32 - # - Répondre -

Re: Heureusement

L'exemple de traité européen est mal choisi. D'abord parce que personne ou presque ne le défendait explicitement au nom d'une meilleure efficacité économique, mais bien plutôt en fonction d'idéaux à la fois nébuleux et en contradiction avec, justement, la lettre du traité lui-même (et avec l'esprit, je pense).
Et ce n'est effectivement pas là que Val s'est lâché en tant que suppot du capitalisme monopolistique (je plaisante), mais nous plutôt a ressorti tous les philosophes du XVIIIeme qu'il s'est d'ailleurs dispensé de lire pour n'en retenir qu'un digest façon petit catéchisme.
Mais je maintiens : A plusieurs reprises Val a défendu l'idée que le système (libéral) est globalement bon, et juste un peu à réformer (sans trop s'étendre d'ailleurs sur les réformes). Je le reconnais, j'ai pas les sources et un peu la flemme de m'y mettre.
Il ne s'agit pas là d'anathèmiser Val, mais de partir de données objectives (Val dans Charlie du XX/XX/XXXX a dit ça et ça etc, donc CQFD).
Et comme je le disais plus haut, je ne vois pas pourquoi il faudrait prendre des pincettes avec un type à la fois d'une nullité intellectuelle confondante, d'une arrogance qui ne l'est pas moins et qui a tout renié au fur et à mesure que sa notoriété grandissait.

memapa - 07.04.08 à 00:58 - # - Répondre -

Re: Heureusement

Ah, la question du reniement ! Quel beau sujet que tu introduis là.

Mais pour l'heure, bonne nuit, à contre-coeur.

vfwh - 07.04.08 à 01:51 - # - Répondre -

Re: Heureusement

Intéressant tout ça. Hélas je n'ai pas le temps de répondre vraiment...

Petite anecdote du jour : quand j'étais étudiant (ce qui a duré trois mois, à peine), j'ai vendu Charlie Hebdo (1993-1994) à la fac d'Evry en tant que représentant officiel, ou un truc ronflant dans le genre. En fait, je les recevais par paquets de dix chez moi et comme je ne mettais pas les pieds à la fac, que j'avais très vite arrêtée, je n'ai jamais vendu les Charlie, je les distribuais aux copains gratuitement.

Charlie m'a donc logiquement réclamé les sous, que je n'ai jamais remboursés (sans malice : par négligence, évidemment). Puis ils ont fait péter les huissiers, pour 600 francs.

J'avais légalement tort, eux aussi (moralement — j'ose le mot). Assez révélatrice cette attitude je trouve, de la part d'un journal encore vaguement de gauche à l'époque (qui s'en gargarisait !).

C'était l'époque de Xavier Pasquini, Lefred-Thouron, etc., en effet bien plus sympa et fraîche, même s'il y avait déjà de la bonne daube : les chroniques fadasses de Renaud, le tontinolâtre (pauvre vieux... Renaud, je veux dire). En tout cas, Caroline Fourest faisait encore pipi au lit. Et moi je me pignolais en lisant les Charlie de 78-79 rachetés dans une brocante, avec... Berroyer, Manchette, Delfeil de Ton, Choron...

Ca se passe de commentaires, au fond...

60millions - 07.04.08 à 15:21 - # - Répondre -

comment ça, un mauvais exemple ?

S'il fallait attendre que le libéralisme s'avance sans son masque pour en dénoncer les "deus ex machina", on aurait plus grand chose à se mettre sous la dent... En négligeant la question de l'inscription de la concurrence notamment dans la constitution elle-même, Val prônait une consolidation politique de l'Union, peu importe ce qu'elle impliquait. Alors si tu veux, on peut taxer ce positionnement de "passivité néo-libéral", et non de "néo-libéral", il n'empêche. Je pense donc que c'est un très bon exemple. On peut d'ailleurs approfondire : Val accusait les "nonistes" de gauche de s'allier avec les nationalistes de tout poil, arguant que cela faisait un melting-polt brun rouge des plus inquiétants. Mais en creux, il se dénonçait, certes implicitement, comme faisant parti d'un groupe homogène (les "oui") ; dont beaucoup d'UMP tendance libérale, justement.
Tout à fait d'accord avec toi pour ce qui est du digest dix-huitièmiste, en revanche.

TH. - 07.04.08 à 15:33 - # - Répondre -

Re: comment ça, un mauvais exemple ?

Tu rappelles justement les arguments infects qu'il utilisait. Au fond tu as sans doute aussi raison (mais moi aussi...), et c'est en creux dans ce que je dis plus haut : il faut quand même avoir quelqu'un avec qui discuter. Le comportement argumentaire de Val le rendait difficile à véritablement considérer comme un interlocuteur honnête et animé de bonnes intentions.

Sa position de fond était peut-être finalement une couverture, ou au mieux un produit secondaire, de son agenda constant de tentative de minage de la résistance à l'ordre établi, qui le gêne de plus en plus au fur et à mesure qu'il devient lui même un chaînon de cet ordre.

vfwh - 07.04.08 à 23:37 - # - Répondre -

Vive Enrico

"Les gens du Nord..." (Macias, barde du pouvoir)

pdf - 06.04.08 à 13:06 - # - Répondre -

apparement, il y a aussi eu récemment "Pendant que nos enfants sont dans des stades, les votres sont dans des congélos" (Brest/Guingamp..).

Je dois admettre que non contente d'en rire, j'envie vaguement l'esprit de synthèse de ces mecs...

(information d'une importance capitale, je sais, mais je n'avais pas d'avis tranché sur Philippe Val)

Ephélide - 13.04.08 à 11:45 - # - Répondre -

Taddeï revu sur le net

Ai pu voir l'émission en différé sur le net. Ok avec toi. Il me souvient la très décapante intervention du jeune homme fatigué Camille de Toledo et de son "Mais que vous êtes fatiguant tous !" dans une émission passée, avec Alain Badiou en off. 

Faut tenir bon Nikita, ils cherchent à nous épuiser.

PDF - 30.07.08 à 15:18 - # - Répondre -

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