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60 millions de social-traîtres

« Chaque homme sait, au fond de lui, qu'il n'est qu'un tas de merde sans intérêt. » (Valerie Solanas)

Acquiescement et péroraison

Je vous présente la femme qui acquiesce. L'assentiment silencieux, le mouvement de la tête et des yeux — poids du menton qui tire la tête, et les deux paupières, vers le sol : gravité ! La femme qui acquiesce imite la gravité. La femme qui acquiesce est une simulatrice. Elle fait semblant de comprendre : écoute, désespérément. Peu importe qu'en face l'homme pérore, se soit perdu depuis longtemps déjà dans les méandres d'un monologue confus, attende que quelqu'un, quelque part, un barman par exemple, l'interrompe, le sauve, le tire hors du piège de sa pédanterie de l'instant : la femme acquiesce, et sourit, et hoche, à intervalles honteusement réguliers, la tête. On ne décèle pas le moindre mépris dans son sourire — un mépris qui pourtant rassurerait l'homme sur la qualité de sa proie. Non, la femme sourit, acquiesce, simule, gravité, point G, l'homme pense point G, comment le trouver au fond, celui-là, lui demander ? la choquer, peut-être ? où, à quel niveau, combien de doigts ? que répondrait-elle ? sait-elle encore parler ? d'où vient son silence ? de ce qu'elle me désire ? ou bien n'a pas envie de passer pour une imbécile ? pourquoi ne me méprise-t-elle pas ? pourquoi ne pas mépriser le méprisable ? le péroreur ? le Solal merdique de l'âge de la com ? l'homme aux trente-deux dents exactement semblables, immaculées pour mieux, etc. ?

Mais je suis sur des rails, pense le péroreur. Il est trop tard pour bifurquer. Un coït s'annonce. Cohen ne me sera d'aucun secours, à présent, ni Dick. Dick ! Bite. Ah, ah ! rit l'homme qui pérore — en douce il rit : il le calfeutre, son rire. Il pense à sa bite. C'est dans l'ordre des choses.

Nikita Calvus-Mons le 26/10/07 à 14 h 22 dans Littéraire-traître
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Commentaires

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Chouette texte. Turbocompressé l'était aussi. Les deux ensemble dessinent un bel univers, j'aime beaucoup cette facette-là de ton écriture. Si j'osais me permettre un conseil, je dirais, c'est sur ce fil-ci qu'il faut tirer.

Catherine - 26.10.07 à 15:52 - # - Répondre -

D'accord avec Catherine.
Accessoirement, cet sentiment de vacuité vient souvent que le discours est celui de la phase de séduction, donc inodore, consensuel et - justement - vide sur le fond. Il s'agit d'éviter tout ce qui pourrait braquer la proie. Par exemple, on ne branche pas une électrice UMP en lui parlant de la necessité d'augmenter la pression fiscale (ce n'est pas purement théorique, ça m'est arrivé - de brancher une electrice UMP).

memapa - 26.10.07 à 16:27 - # - Répondre -

Merci les amis, c'est de l'écriture quasi automatique en ce qui me concerne... Le point de départ, c'est que je repensais à la fille qui fait des chroniques dans les Rendez-vous de l'entreprise. Cet oeil vide, ce rictus permanent, cette timidité de bonne élève, sage, ni moche, ni belle. A-t-elle couché avec Jean-Marc Sylvestre ?

Bon week-end ! Je pars dans le Limousin.

(Tout ceci est extrêmement érotique, non ?)

60millions - 26.10.07 à 17:28 - # - Répondre -

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