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60 millions de social-traîtres

« Chaque homme sait, au fond de lui, qu'il n'est qu'un tas de merde sans intérêt. » (Valerie Solanas)

Délicatesse des fins de banquet

« Provocation ». Un commentaire sur ce mot rabâché : dans Control, le personnage de Ian Curtis valide le projet de pochette de Bernard Sumner pour leur premier EP (An Ideal for Living) par ces mots : « C'est bien, c'est provocateur. » Or le sous-titre est vague, parce que le vocable français englobe tout et n'importe quoi, et on ne sait plus vraiment quoi ce qu'il désigne peut bien « provoquer ». (À peu près tout, en fait : des érections, des éclats de rire, des envies de meurtre...) Le mot est galvaudé, n'a plus aucun sens. Un adjectif composé bien plus subtil — mais difficile à traduire efficacement pour le cinéma — est utilisé dans la version originale : thought-provoking. (C'est-à-dire : « déclencheur de réflexion(s) ».) La provocation n'est jamais gratuite. Si elle l' « est », c'est que c'est donc tout autre chose — qu'un imbécile juge provocant.

Les réactions outragées, dans un sens comme dans l'autre (dans le rejet et la haine comme dans l'idolâtrie et l'amour) n'ont absolument aucun intérêt. Aucun. Elles ne sont que bruit médiatique. Seules comptent — en amont — la liberté de l'artiste et — en aval — les réflexions qu'elle aura « déclenchées ». En fait de réflexions rationnelles, ce sont même plutôt des sentiments, des vibrations. Il s'agit de réagir à l'art, non pour ou contre l'artiste. De moins en moins de spectateurs semblent en être capables — cercle vicieux contemporain : l'interprétation socio-psychologique de l'art, c'est-à-dire, peu ou prou, la condamnation sous toutes ses formes de l'artiste lui-même, ne peut que pousser celui-ci à « aller plus loin » et à se mettre ses juges encore plus à dos, par légitime réaction de dégoût. Je suis de ceux qui en rient et en riront, plutôt satisfait de n'être jamais « choqué » par ce qui n'est que fiction ou théâtre.

Tiffany Anders et Boyd Rice, Absence Makes the Heart Grow Fonder.

Boyd Rice, Why Did the Feminist Cross the Road?

Nikita Calvus-Mons le 03/10/07 à 03 h 52 dans Artistique-traître
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Commentaires

C'est très artaudien tout ça

En passant, le documentaire Joy Division est-il sorti ? J'ai entendu du bien de celui-là aussi.

Arnaud H - 03.10.07 à 16:57 - # - Répondre -

Re: C'est très artaudien tout ça

Non, je ne savais pas qu'il s'en préparait un. Je vais... investiguer, comme on dit (mais on ne devrait pas l'écrire, c'est immonde). C'est sorti aux US Control ? Si oui fonce.

60millions - 03.10.07 à 17:38 - # - Répondre -

Re: C'est très artaudien tout ça

Ca sort dans une semaine, et encore, probablement seulement à NY et LA pour commencer. Une interview de Sam Riley qui t'intéressera sûrement.

Arnaud H - 03.10.07 à 19:20 - # - Répondre -

Re: C'est très artaudien tout ça

Ouais, excellente interview, le gars est très bien.

Le bout sur Mark E. Smith de The Fall est marrant, car dans Control, après une crise d'épilepsie bien violente, tu as Rob Gretton qui lui dit pour le détendre : « Could be worse. You could be the lead singer in The Fall. » Et apparemment, si j'ai bien compris ce bout de l'interview, Riley jouait Mark E. Smith dans 24 Hour Party People. Ironie du sort.

Et en effet, comme il est dit à la fin, la grande idée, c'est d'avoir fait jouer la musique par les acteurs (qui sont aussi musiciens), c'est-à-dire qu'ils interprètent réellement jusqu'au bout les gens de Joy Division. Ça recrée assez brillamment l'urgence qui les animait sur scène. Impossible de ne pas avoir les larmes aux yeux devant la scène de Dead Souls par exemple, ou de ne pas frissonner devant la première apparition télé.

60millions - 04.10.07 à 03:28 - # - Répondre -

Lee

Je n'avais jamais saisi à quel point le Boyd avait écouté le Lee (Hazlewood).... faudrait que je me replonge dans mes vieux disques pour voir si c'est un one-shot ou une tendance...
Thomas t'es qu'un gros salopard de nazi de jouer du Boyd Rice


 

GGG - 03.10.07 à 22:28 - # - Répondre -

Re: Lee

Ah oui, Hazlewood donc... (Désolé mais j'ai lu à l'envers.)

Je crois que c'est quand même un one-shot, le morceau avec Tiffany Anders est pas représentatif du tout, mais je l'ai mis pour le refrain, qui est parfait... Tiens, moi, j'ai du mal à comprendre ce qu'il dit sur les refrains, c'est un contrepoint machiste aux lamentations de la femme éplorée (« How I miss him when he wanders / Sitting by the telephone to hear his sweet voice », etc.), pour sûr, avec sa voix chaude et détachée, mais quelles en sont exactement les paroles ? Si quelqu'un sait, qu'il parle !

Moi, j'entends ça, qui ne doit pas être très loin de la vérité, mais ne l'est pas :

Refrain 1
Out of sight, out of mind
Lick my ball and chain behind
Wild women
(...) times waiting for meeee

Refrain 2
Out of sight, out of mind
Gotta have a swinging time
Neon lights
Girls galore waiting for meeee            
[mon vers préféré si c'est ça]

Refrain 3
Out of sight, out of mind
Never know what I might find
(...)
(...) waiting for meeee

60millions - 04.10.07 à 03:06 - # - Répondre -

Et comparé au Ian Curtis qu'on voit dans 24 hour party people ça donne quoi ? Je n'aime pas Winterbottom d'habitude, mais son biopic malhonnête de Tony Wilson - mort il y a deux semaines tiens - m'a scotché. Très joli plan sur les chaussures du pendu, avantage à New Order sur Joy Division et des faux Happy Mondays presque aussi vertigineusement débiles que les vrais. Que des choses pour me plaire.

Faut que je voie Control avant que ça disparaisse des salles tiens.

Gödel lit Bellow - 08.10.07 à 20:39 - # - Répondre -

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