60 millions de social-traîtres
« Chaque homme sait, au fond de lui, qu'il n'est qu'un tas de merde sans intérêt. » (Valerie Solanas)
I-III-IV
J'aime bien les lignes de basse conquérantes, qui grimpent sur trois notes, comme celle du Magnet's Coil de Sebadoh (1994). Elles évoquent vraiment une charge héroïque, ou un emballement vent arrière, toutes voiles dehors : elles donnent envie d'en découdre. Après un refrain souvent dispensable (que la pop impose), c'est le retour au nerf du morceau, au couplet, le charley bien tendu en soutien, concentré sur l'objectif qui est : construire et énerver ; donner envie au guitariste de cisailler ses cordes. Batteur et bassiste doivent porter ce narcissique-né vers le vrombissement collectif.
Mais je trouve qu'ils ne le font pas génialement, Sebadoh. Car une fois sur deux (en fait le cycle, qu'on aimerait ostinato sur quatre mesures, tourne sur huit) il y a cette variation systématique, donc téléphonée, sur la deuxième note du cycle. Une descente d'un demi-ton, au lieu de l'héroïque montée de tierce majeure, descente qui n'apporte rien de rien, retranche plutôt, dans un tel morceau, porté vers l'attaque. On sent qu'ils la font cette variation — de « tarlouze », dirait le fan d'AC/DC — pour compliquer un peu le morceau, ne pas sombrer dans le simplisme et la répétition (pourtant, c'est Sebadoh, pas Genesis !) mais c'est une erreur grossière, le morceau s'en affaiblit, il déçoit la plupart de nos espérances. La prétention, vraiment, quel fléau !
C'est la même ligne de basse sur Ultraviolet de U2 (1991) : mais le morceau est ici propulsé sur quatre mesures, il n'y a pas cette note étrangère, ce deuxième cycle poussif : on reste dans le sobre, l'efficace, la montée héroïque, avec juste un zigouigoui sur la quatrième mesure qui m'a toujours épaté par sa puissante simplicité, son évidence. Sa facilité, oui. (Et pourtant, je n'ai jamais réussi à trouver un bassiste jouant rond comme Clayton. J'en rêve la nuit ! Sobriété, puissance, pas de falbalas, pas de démonstrations, pas de cirque !)
Ah, le zigouigoui !
Nikita Calvus-Mons le 10/04/07 à 16 h 20 dans Musical-traître
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