60 millions de social-traîtres II

Nous glisserons à la surface des choses

Il est peut-être temps de passer à autre chose. Le football ne pénètre pas des masses chez mes hardcore readers, j'ai même eu quelques résiliations d'abonnements à gérer ces dernières heures ; le sentiment résultant s'approche d'une tristesse infinie : le lecteur est bien le pire des social-traîtres, fidèle en amour comme la Bovary qui, dès qu'on l'ennuie en parlant un peu boulot, file en loucedé la nuit rejoindre son amant et tout ça parce qu'il a un énorme sexe.

Pourtant, la part de marché a augmenté, sensiblement. Mais les lecteurs aspirés par cet artifice douteux sont de mauvais lecteurs, volatils, qui ne reviendront pas. La stratégie marketing de ce blog ne saurait dévier d'un pouce tant elle a donné, jusqu'alors, de juteux fruits (des poires, en fait). Sus au footeux. Nous allons faire ce qu'on appelle une revue de Web, ce soir. Une fois n'est pas coutume, parlons donc de ce qu'il se passe d'à peu près enthousiasmant autour d'ici. Prions pour que le hardcore reader, celui qui connaît le site depuis avril 2005 — il y était tombé en tapant littérature de qualité dans Google —, ne fuie plus.

C'est pourtant sur un forum de footballeurs lettrés (et orgasmiques après la victoire éclatante du onze français contre l'ibère nation) que tout a commencé, quand quelqu'un posta l'adresse du site d'un certain Bouzard, talentueux exégète du ballon rond, pratiquant le strip avec vigueur (salope !). Mon expérience de vieux renard du Web me fait systématiquement remonter dans la première URL venue, le plus haut possible, et je tombai ainsi sur le site bourré de merveilles de Sylvain Barraux.

Il y a cette tradition dans les blogs de se faire passer des petits questionnaires idiots, du niveau intellectuel d'un in-octavo de Paulo Coelho, censés refléter le profil psychologique du graphomane moyen et, accessoirement, lui permettre de pondre un post sans bouger les doigts. Genre : « Si vous étiez un animal ? Si vous étiez une plante ? Si vous étiez une ville ? Si vous étiez une matière ? Si vous étiez une marque de téléviseur ? » Ce genre, quoi. Le QCM pour asséchés du bulbe. Cette gymnastique para-psychologique hypnotisante de connerie, qu'on n'accepte de pratiquer que si elle nous est proposée par une fille sublime et un peu légère dont on effleurerait volontiers le sexe. Eh bien. Eh bien, il y a, dans le genre, quelque chose de créatif, pour peu qu'on ait du talent, comme Sylvain Barraux certainement en possède quelques barrettes : vous trouverez sur sh1ft.org l'explication de la contrainte, ouphopienne en diable, qui lui a permis de créer, en vingt photos, un singulier autoportrait, caché sur son site foisonnant (expression toute faite : je bats ma coulpe, pardonnez). À chaque question, on répond par une photo.

Il travaille apparemment beaucoup, Barraux, et publie également une revue au nom évocateur (tiens ! un autre bout de phrase toute faite, veuillez m'excuser, je me flagelle un bon coup, et je suis à vous...) : Spam. J'aime beaucoup le nom, et ça a l'air d'une intelligence bien supérieure à la normale. Cela m'évite d'en parler, c'est reposant. La mienne de revue est morte (les miettes intéressent pourtant quelques charognards) mais la prochaine est sur les rails, déjà presque finie. Je ne sais pas pourquoi, mais je crois que j'aimerais assez que S. Barraux l'aime, et en chope le barreau. Sylvain, si tu lis ces lignes... il y a du sexe dans ma nouvelle revue.

(Réussi à caser trois fois le mot sexe dans l'article : les gens du marketing seront contents. Fini, le lecteur volatil. On va fidéliser grave.)

Nikita Calvus-Mons le 29/06/06 à 01 h 38 dans Littéraire-traître
Article précédent - Commenter - Article suivant -