60 millions de social-traîtres
« Chaque homme sait, au fond de lui, qu'il n'est qu'un tas de merde sans intérêt. » (Valerie Solanas)
Surtout, ne t'excuse pas
J'ai eu récemment deux problèmes après avoir écrit sur ce blog. Le premier, c'est qu'un ancien copain a cru que je souhaitais sa mort parce j'avais écrit « mort » au sens figuré dans un texte où il s'était reconnu (avait cru se reconnaître). Le mail qu'il m'a envoyé ensuite était assez clair, et commençait par : « Enfoiré, »
Je lui ai répondu, pour calmer le jeu, proprement soufflé qu'une pensée aussi vicieuse ait pu lui traverser l'esprit, même à lui.
Le deuxième gros problème, il n'en reste aucune trace ici. C'était beaucoup plus violent, et sans doute plus absurde. Étrangement, ça s'est arrangé, alors que c'était vraiment très mal engagé.
Qu'en conclure ?
Le point commun entre les deux histoires est leur catalyseur. J'écris quelque chose qui est mal pris par quelqu'un. De plus, ce quelqu'un vient d'écrire un texte, que je n'ai pas lu, sur le même thème. Je ne l'ai pas lu mais la faute est apparente. Et l'angoisse de l'agression personnelle est en marche, c'est compréhensible*. L'écrit public est très dangereux quand il est mélangé avec les amitiés, les amours, la famille. Les allusions réelles ou supposées doivent être absolument interrogées, au premier signe de doute et de paranoïa, pour ne pas risquer de faire pourrir des relations autrement plus fortes qu'un minable post de blog sur le roman ou une chanteuse sans voix.
De façon révélatrice, l'absence de réponse ou de la moindre excuse de la part du type qui m'avait accusé, en gros, d'être un charognard, ou un assassin virtuel, contraste en tous points avec les explications étayées et sensibles (comme le capitaine est sensible) que j'ai échangées avec la personne que j'avais pourtant bien davantage violentée, sans autre raison qu'une colère dévastatrice et sans réel objet, que j'avais dirigée sur elle gratuitement. Ce qui révèle de sa part, et c'est mon seul point de vue sur cette question lancinante, plus d'intelligence que chez le premier, ou, plus prosaïquement, l'absence chez elle de la dinguerie animant l'amateur déçu de Carla Bruni qui pensait réellement que je souhaitais sa mort.
Je n'ai jamais cru nécessaire de m'expliquer avec ce sympathique garçon sur le harcèlement moral qu'ont subi à une époque pas si lointaine, et à sa nauséabonde initiative, deux de mes plus chères amies. La rupture, unilatérale, m'avait suffi, qu'il avait fait semblant de ne pas comprendre. Aujourd'hui, c'est enterré, et je me contente de sourire en l'imaginant user de tous ses talents de manipulateur d'open space pour expliquer aux plus crédules de ses actuels camarades de marelle qu'une OPA hostile du gros méchant de Redmond serait une gifle morale inqualifiable adressée à sa petite multinationale politiquement irréprochable du secteur tertiaire. De gauche, la multi. Alors que Microsoft est, c'est bien connu, de droite. D'où l'horreur.
On fait de la politique comme on peut, où on peut. Aux sentiments, à 100 %, en ce qui le concerne. Ce qui me rappelle quelqu'un, et quelque chose... mais qui, et quoi ?
* Pour comprendre, il suffit de renverser le problème. Admettons que j'écrive ici, un jour, mon amour immodéré pour la choucroute alsacienne. Deux jours plus tard, une camarade écrit, avec l'outrance grossière et la mauvaise foi qui la caractérisent, que : « La choucroute est une insulte à l'humanité, et tous les amateurs bedonnants de choucroute méritent une seule chose : la pendaison à un chapelet de saucisses de Francfort. Tous ces cons peuvent crever. » Il va sans dire que je serai, avant toute explication, extrêmement choqué. La camarade, découvrant mon texte quelques heures après avoir écrit le sien, éprouvera probablement une honte et une gêne angoissantes. Ensuite, soit le silence digère tout, l'usine à refoulement se met en marche de part et d'autre et on s'avoue, quelques jours plus tard, devant une bonne choucroute, qu'il y a eu un gros malentendu, soit on monte tout de suite en puissance, affreusement vexé, et c'est le clash. À tout prendre, je préfère le bon gros clash argumenté, qui ne laisse aucune prise au refoulement. (Est-ce que j'ai été clair, avec ma choucroute ?)
Nikita Calvus-Mons le 06/02/08 à 14 h 50 dans Social-traître
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