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60 millions de social-traîtres

« Chaque homme sait, au fond de lui, qu'il n'est qu'un tas de merde sans intérêt. » (Valerie Solanas)

Êtes-vous un « compulsive problem solver » ?

Espérons-le pour vous... Vu sur Facebook, donc, une très belle jeune femme, ancienne copine d'enfance (tout le monde désirait plonger la langue dans sa bouche, et éventuellement lui « toucher les seins »), extrêmement fière d'avoir entrepris. Comprenez de cette tournure intransitive qu'elle a monté une société. De vente en ligne. Bon : elle a repéré une niche pendant sa grossesse, a pénétré en douceur ladite niche, en douceur mais non sans succès : elle est par exemple passée sur TF1, ce qui est un réel achievement. Les commentaires vont bon train sur son profil, comme à chaque fois que quelqu'un « passe à la télé ». Des félicitations, bien sûr. Dénuées d'objet, puisque tout le monde se fiche, en fait, de l'existence d'une énième boutique en ligne, fût-elle incomparablement ciblée. Pardon, targuettée. Non, les félicitations et autres congrats de rigueur soulignent uniquement son charisme (force est de s'apercevoir que j'en ai encore le zizi tout dur, et ce depuis 1988) et le fait qu'elle a « assuré ».

Mais je m'égare. Cette belle plante, pas dénuée donc d'un certain talent pour entreprendre, s'exprimant avec aisance, très élégamment et chèrement vêtue, bref, bandante comme c'est à peine permis (sauf peut-être pour les ennemis de classe qui n'érectionnent qu'en présence d'une punkette-à-chien cradingue, dreadlocks au vent (quoique, c'est lourd, une dreadlock), alcoolique, pusillanime, et camouflant son absence ontologique de sex-appeal (et de talent) en jouant du théâtre de rue à Aurillac), s'est inscrite sur un groupe Facebook intitulé « The Art of the Start ». L'art des débuts, ou du commencement, en somme. Je m'excuse pour les parenthèses.

Or donc je m'en vais voir où la somptueuse salope ayant illuminé mon adolescence s'est inscrite, car juste avant elle avait rejoint un groupe sur les Sparks, ce qui m'a très agréablement surpris pour une diplômée d'école de commerce. Et là, je lis ceci, en guise de présentation du groupe « The Art of the Start » :

A group of creating thinkers and (compulsive?) problem solvers from all walks of life. Focusing on practical solutions to common problems in everyday living. If your mind is unhampered by political or religious dogma, and your goal is to be truly free in your thoughts and creative ability, you might be a perfect fit for this group.

Groupe de penseurs en action et de résolveurs (compulsifs ?) de problèmes dans tous les aspects de la vie. Nous nous concentrons sur la recherche de solutions pratiques aux problèmes communs du quotidien. Si votre esprit n'est pas entravé par des dogmes politiques ou religieux, et si votre but est d'être vraiment libre d'exprimer vos pensées et votre capacité de création, alors vous êtes sans doute un élément parfait pour ce groupe.

Ce qui est amusant ici, c'est le paradoxe entre le ton (prosélyte s'il en est, fleurant bon sa secte libérale type Carl Rehnborg) et l'avertissement contre les dogmes. Il y a forcément une bible derrière tout cela, je n'en doute pas. Et dès le paragraphe suivant, j'en ai la preuve :

The inspiration for this group came from a book by the same name: "The Art of The Start" by Guy Kawasaki. The book is mostly about being an entrepreneur. (...) A great book, and a recommened (sic) read.

La création de ce groupe a été inspirée par un livre du même titre : The Art of the Start, de Guy Kawasaki. Le livre parle surtout du fait d'être un entrepreneur. (...) Un très bon livre, et une lecture recommandée.

Recommandée, bien sûr... L'euphémisme est l'arme absolue des sectes en phase d'approche.

Mais ce qui m'a fait le plus rire, dans ce galimatias pour débiles mentaux, c'est la dernière phrase, l'accroche, l'argument commercial imparable, digne d'un horoscope bien ficelé :

If you are a compulsive problem solver, a creative thinker or inventor, or someone who just likes to share new and interesting ideas, join this group.

Si vous aimez compulsivement résoudre des problèmes, si vous êtes un penseur créatif ou un inventeur, ou quelqu'un qui souhaite simplement partager de nouvelles idées intéressantes, rejoignez ce groupe.

C'est lourd, redondant, pléonastique : de la langue de guerrier de la vente. Du prosélyte number one. Et j'avoue que le concept de compulsive problem solver m'enchante. J'imagine la vie d'un tel résolveur compulsif, pour lequel tout est problème et à la fois solution, c'est vertigineux, non ?

Tout un tas de cons se sont donc inscrits sur ce groupe, car ils s'imaginent très honnêtement être des élus, des résolveurs. Cela m'évoque NTM : « C'est peut-être qu'on fait pas partie de la solution mais-mais plutôt du problèèème ! » NTM est-il résolveur, en tant que groupe de rap mort ?

Tout un tas de cons, donc...

Il ne s'ensuit pas que la svelte et magnifique A., au sourire ravageur (et elle sourit beaucoup, et naturellement), même inscrite de son foutu plein gré sur cette liste d'abrutis, soit une conne. Car je n'ai pas complètement perdu l'espoir de me la mettre sur ? sur ?

— LE BOUT !

— Oui, le bout.

— C'est vulgaire.

— Oui.

Nikita Calvus-Mons le 25/02/09 à 21 h 42 dans Social-traître
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Commentaires

La compulsion, dictature de l'utra- libéralisme

COMPULSION
Étymol. et Hist. A. 1298 compulsium « contrainte » (Moreau CCXV, fo 110, B.N. ds Gdf. Compl.); 1311 compulsion (A.N. JJ 46, fo 109 ro, ibid.) − 1526, ibid.; à nouv. ds Besch. 1845. B. 1760 « action de feuilleter des documents » (Voltaire, Lettre à l'intendant de Bourgogne, éd. Moland, no 4149 ds B. de l'Institut national genevois, t. 36, 1905, p. 377 : compulsion d'archives). A empr. au b. lat. compulsio, -onis « contrainte, sommation, mise en demeure (de payer) ». B dér. de compulser* « feuilleter des documents »; suff. -ion*.

augustin dercrois - 25.02.09 à 23:57 - # - Répondre -

A., l'entrepreneuse entreprise

je la rejoignis sur un divan de sa chambre, et c'est là qu'elle commença de m'entreprendre. − Mon jeune ami... Vous permettez que je vous appelle ainsi, dit-elle, profitons vite de ce que nous voici tous deux seuls. (...) Et, tout en protestant qu'elle ne s'adressait qu'à mon âme ou à je ne sais quoi d'intérieur, elle ne laissait pas de porter ses mains à mon front, puis, ...
Gide, Thésée, 1946, p. 1426.

augustin dercrois - 26.02.09 à 00:03 - # - Répondre -

Re: A., l'entrepreneuse entreprise

Arrête, tu m'excites !

60millions - 26.02.09 à 01:28 - # - Répondre -

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